Thierry Dupin :
exclusive interview 2008


CONTINUED FROM PART 1


Monteur-démonstrateur

Comment vas-tu travailler au montage des planches « Banzaï »  ?
Au début, la fabrication des planches se faisait en usine à Neuilly-Plaisance, dirigée par l’ingénieur Paul Héry, qui avait en charge la partie moulage des planches et des roues. J’ai le souvenir d’une visite pendant laquelle j’ai vu la fabrication des planches en polypropylène à partir de billes de couleurs. Entre deux séries de couleurs différentes, vertes, jaunes ou oranges, certaines planches étaient toutes bariolées… C’étaient les billes de couleurs différentes qui se mélangeaient entre-elles ! J’adorais ces panachés uniques. Pour eux, c’était des produits invendables et j’en avais récupéré !
Les trucks étaient sous-traités chez un fabricant associé à Renault, qui faisait des jantes en alliage. Puis, ces pièces étaient acheminées à l’usine pour être monté avec les planches et les roues.
Mais comme tout cela prenait de l’ampleur, Marquant avait trouvé un atelier à Fontenay-sous-Bois, rue Parmentier, pour le montage. Et c’est à ce moment-là que j’ai signé mon contrat chez « Banzaï », ce devait être en novembre 76. J’étais très fier d’être devenu le premier skater professionnel ! (Rires) J’avais acheté une petite Yamaha 50 cc pour aller y travailler tous les jours.

En quoi consistait ce travail exactement ?
Sur mon contrat était écrit : monteur-démonstrateur.
Il fallait assembler les 55 pièces d’un skateboard « Banzaï » ! On faisait ça avec des tournevis à main. On décapait au trichlo le dessous des planches en polypropylène qui était assez gras en sortant des moules, pour pouvoir y apposer les autocollants « Banzaï »  et on montait des piles de skate jusqu’au plafond !

Étiez-vous consultés pour améliorer les produits ?
Bien sûr ! j’étais à la fois salarié de l’atelier mais aussi testeur des nouveautés avec le team. Je ne compte plus les soirées passées dans les environs du domicile de Jean-Pierre à Fontenay où nous testions les planches.
C’est comme ça que nous mettons au point l’antidérapant. Marquant avait créé des petits picots en pointe diamant pour caler les pieds. Mais ce n’était pas suffisant. J’avais le numéro deux de « Skateboard magazine » avec une planche « Hobie » qui avait des bandes de grip et on a adapté ce système. On a modifié les moules pour faire des empreintes en creux dans lesquelles on collait des bandes de grip que Jean-Pierre avait trouvées, en rouleau et vendu pour les marches d’escaliers ! Sont venues ensuite les versions au tail arrière, la « puissance + » et deux tails, la fameuse « KB ». Je trouvais ces planches trop souples et comme le froid les faisait se casser facilement, j’avais bricolé une lame de bois fixée entre les deux trucks, c’est de là qu’est né le fameux raidisseur en nylon ! Plus tard, grâce à mes trucks « Bennett » aux embases de plastique qui cassaient régulièrement, je tendais une barrette de métal du truck arrière au centre du plateau. Jean-Pierre trouvait le montage astucieux et de là les moules ont encore été modifiés pour produire des planches de série équipées du fameux monte trottoir !


Est-ce que ton salaire a suivi la courbe vertigineuse des ventes de planches ?
C’était le salaire de base, le smic. Dans les 1 200 francs à l’époque. Ça me satisfaisait amplement car je vivais chez ma mère, je n’avais pas de dépenses pour vivre pleinement du skate, quoi de mieux ?


Quel était le réseau de distribution de « Banzaï »  ?
Des magasins de jouets, de sport, etc. Nous sommes même allé à Roubaix, à « La Redoute ». Banzaï avait conçu un modèle spécial pour les enfants, la « Surface » qui était une planche basique.


Avais-tu un peu de liberté pour skater sur autre chose que du matériel « Banzaï » ?
Mon pote Christophe de Biarritz m’avait offert un skate américain. Une « Duraflex » double-tail. Dans ma pratique, cette planche a marqué une sacrée évolution ! Mais Jean-Pierre ne voulait pas en entendre parler… Alors que lui-même avait une magnifique « Bahne » ! (Rires)
Je faisais un effort pour rouler en « Banzaï », mais j’emmenais souvent ma « Duraflex » dans mes déplacements…

Justement. Allez-vous aussi porter la bonne parole en province ?
Oui. Nous sommes allés, entre autres, aux Deux-Alpes pour un festival de glisse avec les meilleurs skieurs de la planète. Ils nous avaient défiés pour que l’on descende le tremplin de water-jump en skate ! Mais c’était une pente à plus de 45° en gazon artificiel recouverte de savon noir ! Jean-Pierre et José avaient finalement réussi après quelques gamelles ce qui nous avait valu le respect des skieurs !
Nous étions aussi allés faire un tour dans la piste de bobsleigh de Villars-de-Lans. Cette piste, très étroite et en béton, était quasiment inutilisable en skate car tu es écrasé par la force centrifuge ! On se trouvait éjecté au beau milieu de l’alpage au deuxième virage !
Le dernier jour, avant de rentrer sur Paris, nous avons descendu le col sur plusieurs kilomètres, jusqu’à la vallée. Jean-Pierre nous suivait en voiture, Xavier était remonté avec lui et j’ai continué avec José. On a pris de gros risques, les voitures nous klaxonnaient. La vitesse nous déportait dans les virages et nous roulions sur les graviers au bord des ravins… En bas du col, j’ai vu une roue arrière de José qui s’était barrée en filaments ! Elle avait fondu et José continuait sur les roulements dans une gerbe d’étincelles !  C’est ce jour-là que ma « Duraflex » explosait en deux et Jean-Pierre de dire : « Il n’y a pas que le matos français qui casse » !

Tu n’as jamais eu de fracture en skate ?
Deux ou trois… Je me suis cassé un doigt à Créteil, je ne l’ai pas soigné et au bout d’un mois, il était devenu vraiment vilain et mon grand-père m’a emmené voir un rebouteux (ancêtre de l’ostéopathe). Après m’être fait copieusement engueulé, il m’avait prescrit une barre de lard que je devais garder autour de mon doigt jusqu’à ce qu’elle pourrisse ! Ça puait la charogne, mais ça a marché !


Dans une interview en 1978, tu parlais d’une démonstration mémorable à Nantes. As-tu des souvenirs de ça ?
Bien sûr ! On était parti avec Xavier, Philippe et ma sœur pour une démonstration dans une grande surface de loisirs qui distribuait toutes sortes de matériel : des tracteurs, des caravanes en passant par des bateaux et du matériel de bricolage. Tout ça, dans un énorme hangar. Nous avons commencé la démo sur le plat, puis rapidement, nous avons rajouté un banks contre un pilier du hangar avec des planches qu’on allait chercher au rayon menuiserie, servez-vous qu’ils disaient ! Au bout d’un moment, le banks montait jusqu’au plafond ! Le bruit des skates sur cette construction était infernal, les planches volaient de tous les côtés et retombaient sur les caravanes… Et tout le monde était ravi ! (Rires) À la fin de la journée, le patron avait fait un énorme buffet avec tous les employés, nous avons été acclamés et vénérés par tout le monde…



La Courneuve

Comment découvres-tu le spot de La Courneuve ?
Un jour, dans la cité où j’habitais, une espèce de loubard en cuir, avec une bécane, vient me voir. Il appréciait ce que je faisais en skate et il m’a proposé de m’emmener voir un endroit. Je monte avec ma « Duraflex » derrière lui et nous voilà partis. Sur le chemin, il s’arrête à la cité des 4000 pour aller voir quelqu’un. Là, une bande commence à m’accoster pour me piquer mon skate… Heureusement que mon loubard est intervenu pour les calmer ! Nous repartons peu après en moto en direction d’un terrain vague vers La Courneuve et au bout d’un moment nous nous arrêtons devant un grillage. On passe dessous, traverse un sous-bois et là : miracle ! Une étendue gigantesque recouverte de bâches noires qui devait être un futur lac artificiel. Et au milieu, une énorme table en béton lisse, entourée de plans inclinés parfaits ! Un de ces plans renvoyait vers deux pyramides. Un spot qui ferait crever d’envie les streeters d’aujourd’hui !
Je ne sais pas quel architecte et quel projet fou il y avait derrière ces formes… Mais c’était terrible ! Je me suis élancé sur ce spot pour grinder ces arêtes immaculées…

Comme dans un champ de poudreuse !
Exactement. J’ai été le premier à y laisser mes empreintes ! Le lendemain tout excité, j’en parle à Jean-Pierre et nous mettons rapidement sur pied une expédition pour des photos avec les frères Loubat qui paraîtront dans leur revue, « Skate France ».

En aviez-vous parlé à d’autres skaters ?
Non. C’était mon jardin secret. Personne ne connaissait cet endroit. Il était suffisamment à l’écart et masqué pour que même les gens du coin n’y aillent pas.
Hélas, les gens parlent…


Vous y retournez souvent ?
Oui. Et nous avons même organisé une autre séance, mais avec la télévision cette fois !
Jean-Pierre nous avait fait faire des tee-shirts noirs avec notre prénom et « Banzaï  Team » dans le dos ! Nous avions fixé le rendez-vous un samedi pour ne pas se faire repérer par les équipes du chantier. Mais malgré notre discrétion, on s’était fait arrêter par un gardien au moment de passer sous le grillage ! Il ne voulait rien savoir si nous n’avions pas d’autorisation officielle… On a fait mine de repartir, mais nous sommes tout de même entrés en faisant le tour du grillage ! La session a été très intense. Nous savions que nous avions peu de temps et il fallait se surpasser pour avoir très vite le maximum d’images.
Dans la foulée, nous sommes allés skater une autre architecture que nous avions repérée dans les parages. C’était un immense mur en forme de U ! La hauteur du vide, à l’aplomb, devait être de 5 mètres environ. Les cameramen se régalaient de nous voir skater cette structure. Jusqu’au moment où notre gardien est revenu accompagné de deux flics… Coupez ! (Rires) Après quelques négociations, nous avons pu repartir vers un dernier spot ! Encore un truc de fou que nous avions découvert avec Marquant. Il s’agissait d’un grand réservoir entouré de plans inclinés avec une espèce de pipe qui débouchait sur le réservoir ! Malheureusement, ce pipe était en tôle ondulée ! Mais on arrivait tout de même à prendre de l’élan pour passer au-dessus et aller d’un côté à l’autre du réservoir.

C’était où ?
Vers les entrepôts « Citroën » de Paris-nord, le fameux réservoir Garonor.

Toute cette journée a été filmée ?
Oui. Le reportage est passé sur Antenne 2, dans l’émission « Récré A2 », le mercredi après-midi. Mais je ne l’ai jamais vue puisque c’est à ce moment que nous étions parti aux Deux-Alpes…

Si quelqu’un a la cassette, qu’il nous contacte ! (Rires)
Marquant était très fort pour faire ce genre de plans avec les médias. On a eu « Paris Match », « L’Express », « VSD » pour lequel nous avions été interviewés et photographiés pour la sortie du numéro 1 ! Je sautais par-dessus José, en Gorilla grip… Mes voûtes plantaires s’en souviennent encore !

Quand est-ce que l’usine « Banzaï » se déplace à Feucherolles ?
Courant 1977, « Banzaï » marche de mieux en mieux et Jean-Pierre va fusionner l’entreprise avec la « Major ». « Major Électronique » était une grosse boîte à Feucherolles, dans les Yvelines. Un de leurs actionnaires était Barclay ! Ils faisaient des disques, des raquettes de tennis, etc.
À cette occasion, j’ai fait la connaissance de Tonio da Silva, le fils d’un des patrons qui s’était mis au skate. Tous ces mecs étaient dans la noblesse et moi, j’étais le skater au milieu de ce monde-là !

Tu vas bosser à Feucherolles ?
Non, il était hors de question que j’aille bosser aussi loin de Paris. Je commençais d’ailleurs à gamberger sur mon avenir dans le skate…

Dans le team, qui va y travailler ?
José est parti là-bas en 1978, après son année scolaire.

 

Les compétitions

Abordons maintenant les compétitions. Quelles sont les premières auxquelles tu vas participer ?
La première va être à Zurich. Le skate en Allemagne était déjà plus structuré qu’en France et ils avaient créé la « Confédération Allemande des skaters » ! Lulu Magnus était un des responsables de cette organisation. Et ils avaient organisé avec les Suisses, la première coupe d’Europe, à côté de Zurich. Il y avait près de 500 concurrents !
Nous y sommes allés défendre les couleurs de la France et du team « Banzaï »  !

Lorsque tu dis « représenter la France », est-ce que c’est de manière officielle ? Au niveau d’une fédération ?
La fédération était en train de se créer. Le ministère avait tellement de plaintes et de demandes pour structurer le skate que la fédération de surf a commencé à faire une petite section « skate » de manière à préparer l’agrément officiel avec quelques correspondants régionaux sur le territoire. Mais tout cela en était encore aux balbutiements…

Tout le team va participer à cette coupe d’Europe ?
Nous sommes partis, José, Xavier, Jean-Pierre et Hinano dans le break de Jean-Pierre, la remorque chargée à bloc, en fin d’après-midi !
Au milieu de la nuit, Jean-Pierre fatigué s’est arrêté dans un col des Alpes pour dormir. Moi, je n’arrivais pas à me reposer à l’arrière avec José qui ronflait et Xavier qui prenait beaucoup de place et au bout de quelques heures j’avais skaté le col de montagne en pleine nature, dans la nuit avec Xavier !

Et Hinano ? Comment vivait-elle cette perpétuelle promiscuité avec vous ?
Elle suivait. Elle croyait en Jean-Pierre et ça a payé puisqu’ils ont finalement très bien vécu avec le skate. Ça a été court, mais ils en ont vraiment profité…

Après ce voyage, vous voici donc à Zurich…
J’avais passé une nuit blanche, mais j’étais ébahi de voir le lieu de la compétition. Il y avait un module en résine bleue qui ressemblait à une vague, des rampes de lancement pour le slalom, une belle pente, des pelouses, de nombreux teams aux maillots de couleurs et même des filles !
Nous y avons retrouvé des Français de la côte basque pour un copieux petit déjeuner, Frédéric Bordenave avec son équipe de skaters/surfers.
Fatigué, je suis quand même parti m’échauffer avant la compétition avec José dans une descente. On a commencé à prendre de la vitesse sur une route que l’on ne connaissait pas qui partait dans les bois et soudain le revêtement a changé. Il est devenu très rugueux, mes pieds glissaient avec les vibrations, j’avais sous les pieds une des premières planches en bois lamellé de Gérard Almuzara que Jean-Pierre avait voulu commercialiser… Et je n’ai pas pu éviter la chute dans le fossé ! J’ai perdu connaissance quelques instants et lorsque je suis revenu à moi, José me foutait des claques !
J’avais un trou béant à la hanche, jusqu’aux ligaments. Des flots de sang coulaient le long de ma jambe… Je suis allé au poste de secours porté par José et là, je suis encore tombé dans les pommes !
Jean-Pierre, furax, m’a emmené à l’hôpital de Zurich. Lorsque l’on s’est enfin occupé de moi, le plus douloureux a été de m’enlever les graviers qui étaient dans la plaie. Ils m’ont fait une piqûre directement dans la plaie, posé quelques points de suture, des bandages et je suis sorti le samedi soir…

Ils t’ont laissé partir dans cet état ?
Oui. Jean-Pierre a dû signer une décharge. Il voulait coûte que coûte que je participe à la compétition le lendemain, même si j’avais manqué la journée d’entraînement.

Tu as pu dormir ?
Non. On était dans un gymnase qui avait été aménagé en dortoir avec des cloisons amovibles. On était par équipe. Mais les draps étaient en papier et avaient collé au sang qui perlait encore à travers le bandage…

Tu décides de participer malgré tout aux qualifications ?
Oui. Je suis allé à celles du slalom le matin. J’avais même réussi à me qualifier avec José et Xavier, malgré mes deux nuits blanches et mon accident…

Voulais-tu vraiment participer à cette compétition ou est-ce Marquant qui te mettait la pression ?
Je me sentais obligé de le faire. J’étais tellement investi dans la marque qu’on ne peut pas dire qu’il m’ait réellement forcé. J’ai pris sur moi, même si je ressentais de la pression.

Réussis-tu à te classer dans le slalom ?
Non. Le parcours avait été tracé pour de longues planches qui tournaient peu. Les portes étaient à plus de deux mètres et nous devions pomper pour prendre de la vitesse entre chaque cône, avec nos petites « Banzaï ».
J’étais encore tombé dans les pommes sur l’un de mes runs contre un Allemand ! Et cette fois, c’est Hinano qui m’avait réveillé en me mettant des sels sous le nez…
Jean-Pierre était très mécontent et il était allé se plaindre à l’organisation. On était parti avant la fin, en claquant la porte !

Comment s’est passé le retour ?
Un vrai cauchemar ! Tout le monde était silencieux. Je ne pouvais pas m’allonger sur la banquette arrière avec José et Xavier. Marquant s’est encore arrêté sur une route de montagne et je suis allé dormir dehors, par terre. J’avais décroché la bâche de la remorque pour m’y glisser dessous car il pleuvait. L’apothéose a été un hibou qui n’avait pas arrêté de gueuler toute la nuit !
Arrivé à Paris, j’étais mort. Jean-Pierre ne m’a pas déposé chez moi et je suis rentré en souffrant sur ma petite Yamaha qui était restée à l’atelier…

Que se passe-t-il dans ta tête ? Tu veux arrêter le skate ? Quitter Marquant ?
Pas du tout. J’étais plus frustré qu’en colère. Je pensais surtout aux « premiers championnats de France » qui allait avoir lieu à Bayonne ! Je suis descendu en avion à Biarritz, mon grand-père ne voulait même pas me laisser partir dans cet état. Lorsque mon père est venu me chercher à l’arrivée du vol, j’avais 40° de fièvre ! je suis resté couché la semaine chez lui…

Lorsque ton père te voit dans cet état, quelle est sa réaction ?
Je n’en ai pas de souvenir, il avait son métier… Par contre, lorsque ma mère est arrivé, elle l’a engueulé de m’avoir laissé dans cet état et elle a appelé un médecin. J’ai eu des calmants et des anti-inflammatoires.

Donc, tu participes dans cet état aux championnats de France 1977 ?
Oui. Jean-Pierre Marquant débarque avec José et Xavier et nous partons sur le site, à la Z. U. P. de Bayonne. Les épreuves commençaient par le slalom. Je m’y suis aligné car je ne voulais pas décevoir Jean-Pierre une fois de plus. Mais je n’étais pas vraiment en forme et je prenais également conscience que la compétition n’était pas mon truc. Les copains devenaient des rivaux et je ne trouvais pas ça très sain. Je n’aimais pas cette ambiance.
Bref, je fais l’effort de faire le slalom et je suis tombé une nouvelle fois à cause d’une plaque d’égout qui était sur le parcours. C’est te dire si l’organisation était sérieuse ! Là, j’ai capitulé. De colère, j’ai pris mes affaires et je suis rentré chez moi. Les jours suivants, Xavier venait me voir et me rapportait ce qui se passait sur le championnat. Ça a encore été une énorme frustration par rapport à mon niveau de voir les noms sur le classement final, y compris celui de débutants !
J’ai passé le mois d’août à me reposer sur Biarritz. Je n’avais pas vraiment le moral. Je me souviens m’être enfermé dans ma chambre, en pleurs parce que je pensais que j’allais être viré du team… Professionnellement, je n’avais rien d’autre.

Étais-tu encore en contact avec Marquant ?
Oui. Il était passé chez mes parents. Ils s’étaient un peu « attrapés »  mais finalement, la situation s’était arrangée et Jean-Pierre m’a conservé dans le team. Nous avons passé une journée ensembles rejoindre Arnaud de Rosnay et sa femme Jenna à Hendaye pour tester ses prototypes de Speed-Sail sur la plage et fait une démonstration de skate à Pau.

Il avait une position assez paternaliste et d’un autre côté, vous étiez ses employés ? Ça ne devait pas toujours être très facile…
C’est vrai que ce n’était pas simple ! Il nous avait entraînés à la veille de ces rendez-vous sportifs. Il voulait vraiment qu’on gagne.
Patron, coach, père adoptif… Il jouait beaucoup de rôles ! Je dirais que des deux côtés, pour lui et pour nous, ce n’était pas évident…


Tu disais tout à l’heure que le couple Marquant a été comme une famille pour toi à une certaine époque.
Oui. Je vivais en quasi permanence avec eux. En même temps, son rôle de businessman était toujours présent. Il avait sa boîte à faire tourner, des profits à engrange et son image. Il y a eu quelques abus et des indélicatesses qui aujourd’hui ne passeraient plus…

Mais à cette époque-là, il n’y avait pas de précédent… Que fais-tu lorsque tu rentres à Paris, en septembre ?
Nous retournons à La Courneuve, mais nous avons la mauvaise surprise de voir que le lac artificiel a été mis en eau ! Notre magnifique spot devenu inaccessible !

La fin d’un cycle


Vers quel spot allez-vous vous rabattre ?
Rien n’a jamais remplacé la Courneuve !
À l’automne, Jean-Pierre nous a emmené à la patinoire des Champs-Elysées pour essayer le skate à glace. Les frères Loubat étaient présents pour immortaliser la scène. Le problème était que le moindre tic-tac mettait la glace en charpie ! (Rires) On faisait quelques virages, quelques nose et tail wheelies, mais ça n’allait pas plus loin…
C’est également à la rentrée, suite à ma découverte de la marque Bonna sur un tube de béton à Biarritz que nous organisons une expédition à l’usine à Conflans-Sainte-Honorine. Là encore, nous y allons avec des photographes en passant sous le grillage. On verra les photos dans des magazines, en couverture du livre de Bernard Loubat sur le skate… Il y avait des pipes à perte de vue, mais leur dimension était assez réduite.
Tout se faisait simultanément en Europe et aux Etats-Unis. On cherchait de nouveaux spots, de nouvelles figures, de nouveaux engins. Tout était dans l’air du temps dans une logique et une progression naturelle.

Quel était le deal avec les chaussures « Pony » ?
Je ne sais pas, un partenaire... C’était le business de Marquant et je n’y entrais pas. Il avait saisi l’opportunité de trouver le fabriquant qui sortirait la chaussure française spécialement conçue pour le skate. Il y avait eu aussi Adidas et Noël.

Etais-tu payé ?
Pas en argent, en fringues ! Ma mère craquait car mes armoires étaient pleines de survêtements « Pony » avec le chevron blanc et ça dégringolait de godasses lorsqu’on ouvrait les portes ! (Rires)

Faîtes-vous toujours quelques démos avec le team ?
Beaucoup moins. On va faire la foire de Marseille où j’ai animé le stand « Banzaï » seul, sans Marquant qui était reparti au bout de trois jours avec José et Xavier à cause de leurs études. Il en a profité pour livrer à Roger Simi, du matériel commandé sur le SIG (Salon International de la Glisse) à Grenoble auquel nous avions participé.
On avait suivi Roger qui conduisait une Méhari verte, jusqu’à sa plage privé de Saint-Cyr-Les-Lecques. L’accueil avait été très chaleureux, le soir, nous avions mangé une bouillabaisse « d’anthologie » avec tous les riders de la région : Frédéric Mitrano, Pascal Blaise, etc.
J’ai de très bons souvenirs de ces quelques jours. J’y ai rencontré Claude Galizia, un dentiste qui m’avait sorti dans Marseille pour me faire voir les lieux mal famés, me présenter aux Hells locaux… Claude était un personnage incroyable. Il avait un magnifique van avec un spot sur le toit avec lequel il éclairait les façades des immeubles, la nuit ! Et il avait un micro dans lequel il gueulait : « Ici le commissaire Bourret, rendez-vous ! » (Rires)

C’étaient de vraies vacances pour toi !
Oui, sans Marquant, j’en ai bien profité et rencontré trop de gens sympa comme les deux sœurs Lemière qui vivaient dans une sorte de château aux Caillols !

Comment se termine ton histoire avec lui ?
Quelques temps après, au moment où il fait son record de vitesse, tracté.
J’avais assisté aux entraînements sur la piste de Roissy et aux perfectionnements avec le système de velcro pour tenir son pied à grande vitesse. Le jour du record, la télévision était présente et je crois même que ça a été le premier direct, retransmis par satellite. Et moi, je suis devant mon poste de télé car je n’avais pas été convié ! Je me sentais hors du coup alors que j’avais été partie prenante de toute l’histoire « Banzaï ». Pour moi, c’était la fin et de toute façon, je ne pouvais pas suivre à Feucherolles !


Le Stadium

Comment rebondis-tu ?
J’avais fait la connaissance de Philippe Diel au Troca et qui était le vendeur chez Val-Surf France - Roll-Mach. J’ai rapidement été embauché comme vendeur-monteur par le patron, Marc Colin, avec comme critère : faire quelque 360° sur le trottoir !
Je partageais mes journées entre le magasin où je vendais des skates et l’atelier dans lequel on les montait, rue de l’Étoile.

Tu peux enfin rouler sur le matériel que tu désires !
Oui. Mais au lieu de me fournir au magasin « Val-Surf » dans lequel je travaille, j’allais chez « Colin-Maillard », un grand magasin de jouets qui importait les toutes dernières nouveautés américaines ! J’allais claquer mon salaire de « Val-Surf » chez « Colin-Maillard » ! (Rires)

C’est à ce moment-là que tu vas skater au Stadium ?
J’y vais oui, mais là encore, c’est avec Marquant que nous l’avions découvert. Les patrons du Stadium l’avaient contacté pour voir s’ils pouvaient l’utiliser pour le skate. Le lieu était une espèce de patinoire artificielle avec un sol en « macrelon » blanc qui ressemblait à de la glace ! Et il y avait déjà des patineurs en ligne !

Avec des roues en uréthane ?
Non. En caoutchouc noir, mais les roues étaient déjà alignées, comme maintenant !
Ce revêtement au sol produisait une poussière blanche qui se détachait du sol… Pour le skate, ce n’était pas l’idéal, on était souvent obligé de balayer !

Est-ce qu’il y avait déjà des modules ?
Au début, non. Ensuite, il y a eu une démo « Free Former » et Éric Gros avait apporté les premiers banks qui étaient restés sur place. Par la suite, des plans inclinés avaient été posés sur les rambardes de côté.
Le Stadium restait ouvert le soir assez tard. Il y avait des jours réservés spécialement au skate. On y venait avec nos cassettes et on skatait sur notre propre musique.

C’était le premier concept de skatepark indoor en France !
Tout à fait. C’est également au Stadium qu’aura lieu la première coupe de France à Paris, en mars 1978.

Tu y participes ?
Oui, mais les compétitions, j’avais compris que ce n’était pas mon truc. Je préférais de loin les démos dans lesquelles je pouvais rester concentré sur moi-même sans penser à battre des records ou dépasser les concurrents, c’est là que j’étais le meilleur…
J’avais participé à quelques épreuves. J’étais arrivé 1er ex-aequo en saut en hauteur à 1,20 m et 1er en saut en longueur avec 4,40 m. J’avais foiré mon parcours de slalom car j’avais de mauvaises roues et j’avais glissé sur la poussière du Stadium. Le team « Zone 6 » était là mais plusieurs n’avaient pas leur licence à la fédération, ils n’avaient pas pu participer à la compétition. Ils avaient déjà leur mentalité anti-conformiste et rebelle…
Lors de la remise des prix, Jacques Rutman, producteur d’Antenne 2, annonce qu’il va prendre le meilleur pour l’émission « La tête et les jambes ». Il avait assisté à la compétition, assis dans les tribunes, mais il était indécis quant au choix de celui qui pourrait être le « meilleur » skater. Il avait donc décidé de prendre les cinq ou six premiers afin de nous départager sur un parcours.



La tête et les jambes


Est-ce que l’émission existait à ce moment-là ?
Oui, elle tournait depuis de nombreuses années déjà. Elle était diffusée tous les lundis soir sur Antenne 2.

Pensais-tu avoir une chance d’être retenu pour participer à l’émission ?
À l’issue de la compétition du Stadium et bien que j’ai fini à la 3ème place, j’avais été choisi par le « Nouvel Observateur » pour une interview. Ça avait d’ailleurs un peu fait jaser… À vrai dire, j’avais la dent dure envers les journalistes depuis que l’un d’eux avait écrit un article dans lequel il m’associait au « chinois du skate » parce que je lui avais parlé du Kung fu et de Bruce Lee !
Mais le journaliste du « Nouvel Obs » avait tellement insisté que j’avais finalement accepté et l’article qu’il avait fait était d’ailleurs très positif.

Quelles sont les épreuves pour vous départager ?
Le parcours avait été conçu conjointement avec les gens de la fédé. Slalom, saut en hauteur et en longueur. Par la suite est venu se rajouter le rampage pour le côté spectaculaire qui était vraiment mal foutu ! Il était constitué de deux modules indépendants. Face à face, séparés par deux mètres, il y avait deux plans inclinés à 45°, une petite courbe de transition très sèche et le plan vertical de 2 m de haut ! Un monstre ! Ce rampage avait été utilisé pour la promotion du film « Skateboard » lors d’une démo au Troca.

Et c’est le chronomètre qui vous départageait ?
Oui. Et je suis arrivé premier car je devais être le seul skater aussi polyvalent de l’époque. 

Il n’y a pas eu d’épreuve particulière pour savoir qui passerait le mieux à la télé, qui supporterait le mieux le trac du direct ?
Non.

Est-ce que tu avais été consulté pour donner ton avis sur la faisabilité des épreuves ?
Oui, bien sûr. Nous avions testé différents parcours pour trouver le meilleur et j’avais donné des instructions pour la position des différents enchaînements entre le slalom, les sauts et la rampe.

J’avais lu qu’il avait été question que ce soit des Américains qui réalisent la partie skate car la production craignait que les Français n’aient pas le niveau… T’avais entendu ce bruit ?
C’est un bruit qui courait, mais sans fondement. La production tenait à ce que ce concept reste français.

Rappelle le principe de l’émission à ceux qui sont trop jeunes pour l’avoir vu.
C’était un jeu très côté à la télé avec deux candidats : la  « tête » et les « jambes ». Le candidat de la « tête » était sur le plateau avec Philippe Gildas, dans les studios d’Antenne 2. Chaque émission avait une thématique particulière, dans notre cas, c’était l’art culinaire ! La « tête » avait également été sélectionnée parmi d’autres candidats et c’est un restaurateur de Saint-Étienne qui avait été choisi. Au départ, ils avaient prévu une épreuve sportive, les « jambes », qui aurait dû être du parachutisme…
 
L’émission étant diffusée en direct le soir, je ne vois pas bien du parachutisme en pleine nuit…
Moi non plus, bien que les jours rallongeaient. En tout cas, c’est finalement le skate qui avait été choisi…

Quel était le déroulement de l’émission ?
À chaque émission, six questions étaient posées à la « tête »  et pour gagner, il fallait y répondre pendant quatre semaines consécutives. À la moindre erreur sur une réponse, c’était la partie « jambes » qui devait repêcher le candidat en difficulté. Si le candidat « jambes » échouait, c’en était fini. Et l’émission repartait la semaine suivante avec une autre équipe.

Et pour les « jambes », à chaque rattrapage, la difficulté était plus grande !
Oui. En saut en hauteur, ils ajoutaient 3 cm. En longueur, 20 cm. Pour le rampage, il fallait passer une nouvelle bande de scotch qui était fixé sur les parois tous les 20 cm aussi !

Tu fais des répétitions au Stadium ?
Oui. Je skatais au milieu des câbles et des projecteurs. Il fallait s’aligner pour rester dans le champ des caméras. C’était assez compliqué. Pendant les répétitions, j’ai eu un accident en saut en longueur car il n’y avait pas assez de place à la réception du saut par rapport à la rambarde ! La phalange de mon gros orteil était passée sur l’autre. J’étais allé à l’hôpital sans que les toubibs parviennent à remettre l’os en place… Après cet accident, je ne voulais plus faire d’essais et c’est Xavier qui avait fait ma doublure pour les dernières mises au point !

Avant la première émission avais-tu rencontré le candidat « tête »  qui allait faire équipe avec toi ?
Non. C’était strictement interdit !

Comment se passe le premier direct ?
J’avais déjà effectué un rattrapage en plein stress. J’avais largement de la marge et je n’avais commis aucune faute. Cette émission, chose rare, a été enregistrée puisque c’était un 1er mai.

La deuxième émission ?
Celle-ci aussi n’était pas en direct, car nous étions le 8 mai et les équipes de télévision ne travaillaient pas. On a donc fait le tournage des deux premières le 24 avril et dans les mêmes conditions que le direct pour que le public ne voie pas la différence ! C’était une chance pour moi car j’ai pu me voir passer à la télévision, assis devant mon poste ! (Rires)

Et ce que tu avais le droit de venir au Stadium pour t’entraîner entre deux émissions  ?
Oui. Le Stadium était en libre accès et j’y étais comme chez moi.

Le parcours et le rampage restaient-ils en place ?
Non, il ne restait que les bandes de repérage au sol car les patineurs occupaient la piste la journée.

Est-ce que le succès est immédiat ? On commence à te reconnaître dans la rue, dès la première émission ?
Oui. Les gens m’arrêtaient dans la rue et dans le métro pour me demander des autographes ! J’étais devenue une vedette du jour au lendemain !

Thierry Roland était au Stadium pour commenter les épreuves sportives, il était comment avec toi ? Déconneur ? Méprisant ? Curieux ?
Il a été très agréable. Il était halluciné de découvrir que le skate pouvait être une discipline à ce niveau-là. Il m’a bien encouragé. Xavier dit « L’Ours » , aussi d’ailleurs ! On l’entendait très bien pousser ses hurlements caractéristiques qui lui avaient donné son surnom ! (Rires)

Combien de planches avais-tu pour les différentes épreuves ?
Trois et j’avais cinq minutes pour faire le parcours. Je commençais avec une planche pour le saut en hauteur. Je prenais ensuite une « Fibreflex »  pour passer les 20 cônes du slalom. Pendant ce passage, un des trois juges allait positionner ma planche de saut en hauteur à la réception du saut en longueur. Je prenais encore une autre planche pour faire le rampage et je fonçais vers l’angle de la piste pour prendre le maximum d’élan pour le saut en longueur, au-dessus des tapis en mousse ! Un vrai parcours du combattant !

Tu en as encore « sous le coude »  lorsque arrive la dernière émission ?
Non, car à la 3ème émission, j’avais pratiquement atteint mes records personnels en trois rattrapages. Pour la 4ème et dernière émission, il y a eut une rumeur parmi les responsables de la télé comme quoi j’avais menti sur mes réelles performances !

Ils pensaient que tu les avais minorées pour gagner plus facilement ?
Oui. C’était fou ! Ils ont même redemandé à Xavier de faire le parcours. Et il n’arrivait pas à le boucler correctement ! Je pense que c’était simplement pour me déstabiliser car ils ne voulaient pas que je gagne…

Tu es dans quel état d’esprit avant d’aborder la dernière ? Ça fait quand même un sacré paquet de fric à la clef…
100 000 francs, pour l’époque, c’était énorme ! Par rapport à un smic qui était à 1 200 francs, l’équivalent aujourd’hui avoisinerait les 400 000 € ! Mais je n’y pensais pas trop. Je ne voulais pas me mettre inutilement de pression avec ça.

Est-ce qu’il y avait des articles dans la presse sur tes exploits ?
Oui, surtout dans la presse télé car l’émission faisait beaucoup d’audience.

Comment se passe ce dernier direct ?
Je flippais ! (Rires) J’étais bourré d’adrénaline. J’entendais des hurlements dans le Stadium. À cette occasion, les tribunes étaient bourrées ! Mes copains bien sûr, mais aussi beaucoup de skaters que je ne connaissais pas… Même ceux que je ne fréquentais pas de la bande de « Zone 6 »  ! D’ailleurs, il y a eu quelques quolibets et quelques sifflements. Je ne donnerais pas de noms et certains se sont même fait virer car j’avais besoin de silence pour me concentrer !


Tu arrives à rester concentré ?
Complètement dedans. Je faisais abstraction de tout ce qui m’entourait. Philippe Dihel, dit « Dielou »  m’a été d’un grand secours dans cette situation. Il a su m’encourager aux moments critiques où j’avais envie de baisser les bras. Il faut dire que lors de cette dernière émission, sur les six questions posées à la « tête » , j’ai dû faire six rattrapages !

T’as envie de le tuer ?
(Rires) Oui, sérieusement ! À la première question posé par P. Gildas au concurrent, on a entendu le réalisateur dire : « Il va y avoir une erreur ! »  Donc je me préparais déjà à prendre le direct pour le repêcher.

Et si toi, tu avais la bonne réponse, tu ne pouvais même pas la donner !
Eh non ! Au fil des rattrapages, je dépassais mes records de saut en hauteur et en longueur. Au 3ème, j’avais déjà la rage. J’ai pris mon temps. Je me concentrais en faisant un peu d’auto-kinésie. J’ai finalement passé la barre en hauteur à 1,22 m au 4ème essai ! Hurlements du public !

Ce qui a contribué au succès de l’émission, c’est le fait que tu doives constamment aller au charbon !
C’est sûr ! J’ai effectué tous les rattrapages jusqu’au 4ème en battant les records de France en hauteur à 1,25 m et en égalant mon record en longueur à 4,40 m dans une ambiance de folie !

Tu te sentais invincible ?
Oui. Mais au 5ème rattrapage, je leur ai dit que je ne voulais pas monter plus haut sur le rampage. Ils avaient déjà ajouté plusieurs bandes de couleur qui n’avaient pas été envisagées et je savais que je ne pouvais pas aller plus haut dans ce contexte, avec la planche que j’avais, surtout après une gamelle. J’ai refusé ! Gildas fulminait en studio ! Qu’on ne pouvait pas changer les règles en cours d’émission. J’ai tenu bon et Thierry Roland a proposé qu’on en reste à cette hauteur pour les rattrapages à venir… Il y avait quand même un mètre de vert, ce qui sur cette rampe était déjà pas mal !

Tu n’as toujours que 5 minutes pour boucler le parcours ?
Oui. Le temps ne variait pas, mais le chronomètre s’arrêtait dès que je chutais ou manquait un élément du parcours. Il reprenait quand je recommençais tout au début, une fois, ça va, deux ou trois et les secondes comptaient vraiment !

Et la dernière question ?
Le mec a encore foiré. Il était déconfit, blême.

Et toi ?
J’ai passé 1,31 m en hauteur et 4,80 m en longueur ! Tous les records de France étaient explosés. Peut-être même celui du Monde en longueur, détenu par Tony Alva ! Et encore, il me manquait un ou deux mètres supplémentaires de prise d’élan pour le final !
L’émission avait tellement débordé sur l’horaire prévu que Gildas a annoncé que les résultats ne seraient donnés que la semaine suivante ! La chaîne a reçu des milliers de courriers de tous les pays francophones qui avaient vu l’émission ! Je pense que ça a dû influencer sur la décision finale. L’audimat avait été tellement exceptionnel qu’ils ne pouvaient pas prendre une décision qui aurait été jugée impopulaire. Et nous avons gagné !

La somme était partagée à égalité entre les deux candidats. Tu n’avais pas un peu les boules ?
Tu l’as dit ! (Rires)

À partir de là, tu dois être sollicité de toutes parts… Le téléphone ne doit pas arrêter de sonner !
Oui. Alain Asse était présent au Stadium et il avait dit à ma mère qu’il me fallait un manager… J’ai quitté « Roll-Mach » en très bons termes avec tout le monde, mais vu la tournure des événements, ils ne pouvaient pas suivre. Le phénomène était devenu trop important pour eux !


 

(Toutes les photos : archives T. Dupin, sauf indiquées)

CONTINUES ON PART 3

 
T. Dupin sur le spot de La Courneuve, 1977.

T. Dupin sur une pyramide, La Courneuve, 1977.

T. Dupin au bassin Garanor, 1977.
Les pipes de la société “Bonna“, Conflans Ste Honorine, 1977.
Carte conçue pour les Internationaux de Zurich par T. Dupin, juillet 1977.
Sticker, 1978.
T. Dupin sur un banks du Stadium, 1978.
Xavier “l'ours“ Lannes, Stadium, 1978.
Au micro de T. Rolland pour le direct de “La tête et les jambes“, 1978.
Rattrapage saut en hauteur, “La tête et les jambes“, 1978.
Source : endlesslines
Sticker Panini, 1978.
Le Stadium
La tête et les jambes

 

 
      the book that hosts ghosts