LE ROOLER GAB’

Le skate a traversé des époques aussi étranges que distinctes les unes des autres, en subissant invariablement leurs influences. Inutile de revenir là-dessus, Un point commun les lie pourtant, impalpable mais toujours présent : le délire.Qui n’a jamais juré un jour de réaliser son propre délire, quitte à céder sur certaines concessions et autres sacrifices. Quitte à construire son délire, Mais ce fameux délire, a-t-il des limites ? Par exemple, le délire classique actuel serait de voir réaliser un big skatepark bourré d'obstacles. C'est plutôt commun. Ou alors de skater avec une board à pneus (style Laurent "Le Goût" Segal), ou bien encore de skater la Warehouse Powell (Xavier et Jérôme style). Moi, quand j'étais petit, je me disais que ce serait délirant de voir les pistes de ski recouvertes de béton à la place de la neige. Et on prendrait le téléskate à la place du téléski, puis on taperait des méga-ollies de bosse en bosse, des airs dans les combes et du slalom entre les sapins… du délire quoi !

Quinze ans plus tard, ce délire passe du domaine de l'imaginaire à la réalité. Grace a un homme qui pense qu'il n’y a pas de raison que seuls les amateurs de ski puissent éternellement profiter des avantages du tire-fesses. Et voila que ce monsieur de 65 ans a decidé de réaliser son délire : un parc strictement réservé à la pratique de sports à roulettes. Installé dans I'arrière pays de Montpellier, entre St-Hypolyte-du-Fort et Durfort, en pleine pinède dans un cadre sympa avec comme fond musical du Thrash Nature balancé par les cigales... La totale, quoi ! Bien sûr, j'en vois déjà parmi vous qui sont morts de rire rien qu'à la vue des photos. S'il est vrai qu'un tel délire répondait à la demande d'une époque révolue, il n'en demeure pas moins éclatant d'imaginer un trip au Rooler Gab, ne serait-ce que pour essayer ce satané tire-cul ! Pour les perfectionnistes, rassurez-vous ! En plus du remonte-pente long de 300 m, vous avez droit à une descente de 1,2 km de long, comportant dix virages relevés style circuit 24 débouchant sur une aire de street (en cours d'aménagment de... 3000 mètres carrés ! ! !). En plus de ça, une big rampe et quelques minis devraient pousser de terre sous peu, de même qu'un village de bungalows. Le pied pour un bon délire, quoi, vous trouvez pas ?

En tout cas, la session que nous avons faîte là-bas avec Jean-Marc Vaissette, Dune et Kareem Campbell fut mémorabte… Et les ricains n'en croyaient pas leurs yeux : un tel délire, ici, en France ! Résultat, deux ou trois ollies mortels dans les virages relevés de la descente, de l'impossible au flip to reverse en passant par d'autres tricot style bien mortels…

Pour un peu, on vous aurait passé l’article en avril, vous ne nous auriez pas cru…
Reste à espérer que l’aire de street saura s'étoffer de nouveaux modules plus performants, et que pourquoi pas, des contests de "downhill style" soient organisés : gants en fer et combat de cuir obligatoires !

Texte et photos Nicolas Malinowski

 

Gabriel Leuret interview

 
Anyway, n°17, septembre 1992. Page 30, 31
 
      the book that hosts ghosts