AUTOPSIE DUN
CHAMPION DE FRANCE OU DEMATOS AU BANC DESSAI
Interviewer un champion de France c'est pas du gateau. Cette race
est rare, très occupée et dans le cas de José
Dematos constamment cha peronné par Jean-Pierre Marquant.
Quand je suis arrivé à Fontenay-sous-bois au domicile
du patron de Banzai France, Marquant a voulu absolument assister
à l'interview de son poulain. Comme je n'avais aucune mauvaise
intention à l'égard du tenant actuel du titre,j'ai
accepté cette condition un peu surprenante. Bon en skate!
SKATE : José, ta carte d'identité
!
DEMATOS : Je m'appelle José Dematos Je suis né
le 5 août 1960 à Porto au Portugal. J'habite dans le
16ème à deux tours de roue du Trocadéro. Je
fais du skate depuis 1976.
SKATE : Quelle était la marque
de ta première planche ?
DEMATOS : C'était un vieux truc avec des trucks rigides,
une Kamikaze.
SKATE : Et ta rencontre avec Marquant ?
DEMATOS : Ça c'est passé aussi
au Trocadéro. Marquant cherchait à former un team
et il recrutait du monde. Il m'a proposé de faire partie
de son équipe et j'ai accepté.
SKATE : Qu'est-ce que tu faisais
à l'époque ?
DEMATOS : J'étais en seconde
technique dans un lycée du 15ème. J'ai continué
mes études de 1976 à 1977 mais je faisais plus de
skate qu'autre chose, j'ai tout abandonné quand Jean-Pierre
m'a proposé de travailler pour lui.
SKATE : Tu es salarié chez
Marquant ?
DEMATOS : Oui, je suis monteur de planches à l'usine de Feucherolles
et je fais des démonstrations.
SKATE : Mais
tu es amateur
ou professionnel ?
DEMATOS : Amateur !
MARQUANT : Oui, José est arnateur.
En fait je lui paie surtout des voyages pour qu'il connaisse le
monde et qu'il se rôde.
SKATE : Tu gagnes combien par mois ?
DEMATOS : Rien à déclarer!
MARQUANT : Pour un garçon de son
âge, il est payé convenablement.
SKATE : Qui est professionnel en
France?
DEMATOS : Alexis Lepesteur de Zone 6 est
professionnel car il est payé pour faire du skate.
SKATE : José, tu es le seul
survivant du team Banzaï des débuts, qui étaient
les autres ?
DEMATOS : Alain de Moyencourt , Thierry
Dupin, Xavier Lannes et Philippe Renaudin.
SKATE : C'est si difficile que ça
de s'entendre avec Marquant ?
DEMATOS : Pas du tout. Chacun est libre
de faire ce qu'il veut. Moi, j'ai choisi de rester fidèle
à Jean-Pierre.
SKATE : Est-ce qu'un autre team
t'a proposé de l'argent pour quitter Marquant ?
DEMATOS : Combien ? Rien à déclarer
mais je crois savoir que Thierry Dupin nous a quittés pour
une somme de 3 500 francs et 300 francs par démonstration.
SKATE : Est-ce que tu as pratiqué
des sports qui t'ont permis de devenir le nurnéro 1 du skate
?
DEMATOS : J'ai fait beaucoup de patin
à glace et de patin à roulettes. Jean-Pierre m'a fait
prendre également des cours de chorégraphie pour améliorer
mon style.
SKATE : Comment se présentent
les championnats de France 1978 ?
DEMATOS : J'ai sauté trois épreuves
car aux dates prévues je faisais des démonstrations
mais c'est fini, maintenant, je participerai à toutes les
compétitions comptant pour la coupe. Il faut que je gagne
le championnat et la coupe.
SKATE : Comment se passe ton entraînement
?
DEMATOS : Normalement je m'entraîne
un mois avant le championnat à raison de 12 heures par jour.
SKATE : Où a lieu cet entraînement
?
DEMATOS : Top secret. Nous connaissons des endroits fantastiques
où personne ne vient.
SKATE : Dans la région parisienne ?
DEMATOS : Exactement.
SKATE : Tu suis un régrne
alimentaire spécial en période de compétition ?
DEMATOS : Absolument pas. Pas de régime
ni de gym, du skate, toujours du skate et encore du skate.
SKATE : Patrice Almuzara a sauté
plus d'un mètre vingt à Sarcelles, est-ce que tu as
peur de lui pour les championnats de France dans cette discipline ?
DEMATOS : Dans un championnat tous
les concurrents sont dangereux. Il se peut que je me fasse battre
par un quelconque inconnu mais en ce qui concerne AImuzara je n'ai
pas peur de lui et je tiens à l'affrontement qui va nous
opposer, oui, j'y tiens vraiment.
SKATE : On dirait que ces championnats
de France 1978 te tracassent beaucoup ?
DEMATOS : Oui c'est vrai, ils me tracassent
parce que je veux être le premier en free, en slalom, en saut
et en vitesse.
SKATE : Quel est ton record en vitesse ?
DEMATOS : Je crois que j'ai atteint les 90 km/h.
MARQUANT : José, je ne veux
pas t'enfoncer mais je crois que tu exagères un peu. Tu te
souviens aux Etats-Unis dans la descente de Signal HilI qui fait
18% les Américains faisaient du 90 sur des skates carrénés.
Moi j'ai réussi à faire du 108 mais en étant
tracté. Non, je crois que tu as réussi à faire
du 80. Mais ça n'a rien à voir avec la compétition
car en championnat le parcours de vitesse doit comporter obligatoirement
deux virages et je défis quiconque de prendre un virage à
80 sur un skate !
SKATE : A propos de ton voyage aux U.S.A. quels sont les skaters
US qui t'ont le plus impressionné ?
DEMATOS : Le premier c'est un Californien, un parfait inconnu qui
s'appelle Larry Snailer et qui est un type fantastique. Ensuite
Ty Page, Gregg Weaver. En revanche, je n'ai pas été
ébloui par Russ Howell
mais alors pas ébloui
du tout.
SKATE : Tu as fait du skatepark en Californie
?
DEMATOS : Oui. C'est dingue la première
fois j'ai eu peur. Quand tu te retrouves au fond d'un bowl avec
tous ces murs qui t'entourent tu as l'impression d'être dans
une prison. Alors pour t'échapper tu n'as qu'une solution
: ton skate. Le skatepark c'est la nouvelle ère du skate.
C'est l'apprentissage de la verticale et l'utilisation de la force
centrifuge. C'est aussi une maladie contagieuse, comme la banane,
une fois que tu y as pris goût tu ne peux plus t'en passer.
SKATE : Tes contacts avec les grands champions américains
?
DEMATOS : Fantastique. Je n'ai jamais vu
des types d'une approche aussi facile. Chez eux la frime n'existe
pas.
SKATE : Quest-ce qui t'a le
plus frappé chez les skaters américains de ta génération
?
DEMATOS : Ils veulent tous devenir
professionnels et gagner beaucoup d'argent en pratiquant le sport
qu'ils aiment.
SKATE : A Skate, on reçoit
des tas de lettres de filles qui nous demandent qui tu es, ce que
tu fais excepté du skate, etc.
DEMATOS : Il faut leur donner mon numéro
de téléphone et
MARQUANT : Non, non, non, pas en période
de compétition.
SKATE : Alors les filles ?
DEMATOS : Je vais être franc,
dans l'immédiat je préfère mon skate à
une fille. Après les championnats de France, on verra.
SKATE : Qu'est-ce qui s'est passé
aux championnats d'Europe de Zurich en 1977, je crois que tu en
conserves un mauvais souvenir ?
MARQUANT : Ça se voulait des
championnats d'Europe mais ça n'en était pas vu qu'il
n'existe pas encore une fédération européenne.
SKATE : Alors José ?
DEMATOS : J'ai terminé 4ème
dans toutes les épreuves.
MARQUANT : La compétition était
tronquée. Je n'ai jamais vu un truc pareil. Une ambiance
déplorable. Il n'y a eu que des bavures. En slalom les plots
étaient placés à 2 mètres et demi d'intervalle
ce qui avantageait les grosses planches en bois. On est parti avant
les résultats.
SKATE : Si jamais tu es battu cette
année aux championnats de France, qu'est-ce que tu feras
?
DEMATOS : Je crois que j'aurai du souci
à me faire. Mais comme je m'entraîne comme une bête
pour gagner.
SKATE : Tu as peur ?
DEMATOS : Oui j'ai peur. J'ai toujours
peur avant une épreuve importante. C'est la peur qui te fait
te surpasser, te surentraîner et qui te fait progresser et
gagner.
SKATE : Sans jouer les oiseaux de
mauvaise augure, si par malheur le skate s'arrête en France,
comme c'est le cas en Allemagne, que ferais-tu ?
DEMATOS : Je travaillerai dans une
autre branche mais je sais que je continuerai à faire du
skate pour le pied ! Mais de toute façon le skate ne peut
que progresser en France !
Voilà Mesdemoiselles, vous savez
tout sur votre idole, l'homme qui fait ce qu'il veut avec sa planche.
Mais n'espérez pas le séduire avant les championnats
de France, il préférera sa planche. Et puis attention,
il y a grand-père Marquant qui veille.
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