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hors-serie
n°13, 1989 |
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BOURGES, PAR EXEMPLE
Onze ans ! Onze ans que le skateboard club de Bourges écrit
quelques-unes des plus belles pages de l'histoire du skate français...
De la préhistoire à la consécration, en passant
par la traversée du désert, les berrichons ont tout
connu : les galères, l'espoir et la gloire ! Une véritable
saga, contée ici dans ses moindres détails.
Histoire de vous donner suffisamment de péche pour suivre leur
exemple...
1977. C'EST L'ARRIVÉE DU SKATEBOARD en France.
Véritable phénomène de mode, tous les adolescents
pratiquent ce nouveau sport grisant en bas de leur H.L.M. : Bourges
n'est pas épargnée. Une dizaine de jeunes se rencontrent
dans le quartier des Barbottes où ils s'adonnent à leur
jeu favori. Quelques magazines spécialisés fleurissent
dans les kiosques et nous permettent ainsi de reproduire et d'apprendre
les nouvelles figures : daffy, 360°, walk the dog... Les mots
" rampes " et " skateparks " signifiaient peu
de choses pour nous : le skateboard n'en était qu'à
ses premiers pas. Techniquement, les planches mesuraient 50 cm de
long par 10 cm de large, les roues étaient transparentes ;
quant aux roulements, on passait plus de temps à courir après
les billes qui foutaient le camp qu'à skater ! Et personne
ne songeait réellement à la création d'un club...
1978. C'EST L'EXPLOSION.
Même le ministère de la Jeunesse et des Sports reconnait
le skateboard en tant que véritable sport : la Fédération
Française de Surf le prend à sa charge, similitude oblige.
Les clubs poussent comme des champignons. Ici, c'est une centaine
de jeunes qui se retrouvent régulièrement à "
La Descente ", dans le quartier des Barbottes. Encore plus de
magazines " spécialisés " : on a de la chance.
Des Banks pavetés (plans inclinés à 45°)
jalonnent notre spot favori. On s'entraîne dur, les chutes sont
nombreuses.
Pas très loin de là habite Claude Isnard. Son père
possède une entreprise et c'est dans l'arrière-cour
de celle-ci que nous fabriquons notre première rampe. Plutôt
mortelle : une fois sur deux, un côté s'écroule
et c'est une gamelle de toute beauté ! Morts de rire ! Enfin,
un club se constitue : un animateur du centre social, François
Guichard, s'en occupe aidé par deux skateurs majeurs : Yann
N'Guyen et Dominique Jabeneau. Le Skateboard Club de Bourges passe
au Journal Officiel en juillet 78 et compte déjà une
quarantaine d'adhérents. François démarche la
municipalité avec d'énormes difficultés. Pour
faire prendre conscience au maire de l'importance du phénomène,
il invite le Team " Banzaï " qui, à l'époque,
correspondait au top actuel... imaginez un peu la joie qui nous animait
! L'artère principale est bloquée pour cet événement,
les bus ne circulent plus. On installe rapidement le bank du club
vierzonnais quand arrivent les pros... Nicolas Skipper s'élance
sur le bank pour rentrer des figures encore jamais vues : frontside
air et rock and roll. José De Matos nous paralyse par la maîtrise
de sa planche en free, en slalom et en bank ! Bernard Chouial,
un local, le gratte même en slalom une ou deux fois. Le public
nombreux applaudit mais ne comprend pas très bien l'intérêt
de ce sport : c'est encore une période de sensibilisation du
skateboard auprès des masses et des élus. La presse
locale en fera large écho, mais cela ne suffit pas. Le club
organise alors une compétition régionale. Des cars de
Moulin, Nevers, Orléans, Châteauroux déversent
les skateurs sur la place du marché de la Chancellerie. Nous
nous étions entraînés comme des pros ! On rafle
tout ! Rideau.
1979. LE SKATEBOARD EST SUR LA PENTE DESCENDANTE. Les boutiques spécialisées
ferment les unes après les autres et les magazines ne paraissent
plus. De plus, la presse non spécialisée tire à
vue sur le skateboard et le descend en flamme : jeu dangereux pour
les piétons (faute d'infrastructures, on skatait sur les trottoirs
!), bruyant (des cris de gosses !). Bref, on nous assassine : les
temps deviennent difficiles... Mine de rien, François reste
en contact avec la municipalité qui finit par nous attribuer
un créneau horaire pour nous abriter sous les halles St-Bonnet.
Côté Fédé, Bourges prend une option pour
l'organisation des championnats de France 79. Peine perdue, ceux-ci
seront organisés à Tignes. C'est un peu dommage, car
on aurait certainement pu obtenir quelques sous pour construire une
rampe...
On se consolera avec la venue du Podium de France Inter et son émission
" Les Mordus ". Bernard Chouial présentera à
un jury composé d'auditeurs un projet super cool : une rampe!
Tout le monde est emballé et on empoche 4000 F. En fait de
rampe, cest un bank de 2m de large par 2m de haut qui sera réalisé.
Puis on déménage aux abattoirs de la ville. Les locaux
de l'époque sont Yves Gourdon, Frédéric Moreau,
Philippe Jabeneau, mon frère Christophe et moi-même.
À force de skater le bank comme des sourds, on finit par l'exploser.
C'est alors qu'Yves réalise un truc inédit : "
le wall ride " ! On avait placé une planche inclinée
en bas d'un mur, afin de faire un bank. Yves sera le premier à
rouler sur le mur ! Il montait bien à un mètre !
Une fois, alors qu'Yves tournait sur le mur, le bank s'est écroulé
! Bonjour la totale ! Puis les études nous font prendre des
voies différentes. On se rejoint de temps à autre, mais
on n'a plus vraiment la pêche. Pendant l'été 79,
la ville de Bourges nous avait pourtant construit un " Skatepark
". Vu d'avion, on pouvait y croire. Vu des pâquerettes,
tout était plat ! Quel gâchis...
1980. LE CLUB NE
FONCTIONNE PLUS DU TOUT. Plus d'abri, plus d'entraînement. On
s'emmerde ! Je ramène des nouvelles fraîches de Touraine
: là-bas, ça skate encore pas mal. La M.J.C de Joué
possède même un superbe bank avec deux mètres
de verticale et une rampe mise à la disposition du club par
la société Rollet. Je reste toujours branché
sur le free-style et skate la rampe occasionnellement. Puis tous les
copains berruyers arrêtent le skate, à l'exception de
Fred et de mon frère. Dur. Restant à Tours, le skate
me branche toujours. Particulièrement quand je skate seul.
C'est bizarre, paradoxal... mais c'est comme ça !
1981. VOUS PRENEZ UNE FEUILLE DE CALQUE et vous la posez sur 1980.
Ça donne la même chose. Pire, on croit être les
derniers skateboarders français. On se prend même pour
des tarés ! Dégénérescence totale
des neurones berrichons : connaissances (nuisibles) avec mesdemoiselles
" Alcool " et " Cigarettes " et présentation
à madame " Parties ". À force de zoner, on
prend tellement conscience de perdre notre temps qu'un soir, en tournant
les pages de nos vieux " Skateboarders " (Le " Trans
World " américain de l'époque), on décide
mon frère et moi de remonter le club O.F.F.I.C.I.E.L.L.E.M.E.N.T.
Dans le genre " Plan de masos ", il est difficile de faire
mieux ! Mais on a ça dans le sang : LE SKATEBOARD ! Tout le
monde rigole : les phrases du genre " Des vrais mômes !
" ou " Mais c'est plus à la mode ! " (j'en passe
et des meilleures),on les entendra pendant trois/quatre ans. Je contacte
Fred : c'est parti mon Kiki !
1982. PREMIER GROS PROBLÉME. Fred et mon frère ne sont
pas majeurs. Jeff Moreau et Jean-François Gourdon assurerons
donc les responsabilités de secrétaire et trésorier
pour un an. Je prends rendez-vous avec l'adjoint au maire chargé
des Sports : Pépito (c'est son surnom !) nous motive à
fond pour la reprise de cette activité. C'était mon
ancien prof' de gym et je le tannais déjà pas mal avec
mes histoires de skateboard. Ça aide quand même un peu...
Jacques Gonzalès décédera en juillet 85, pendant
notre premier stage. Ce type était sensas ! Il nous a expliqué
les méandres de l'administration et fait comprendre clairement
que si nous voulions nous faire entendre, il fallait être nombreux.
Message reçu. On part coller 1200 tracs dans la ville pour
annoncer l'événement : une quarantaine de jeunes médusés
viennent regarder les cassettes vidéo de Jacky Frasnier. On
est tous dans une salle, on fait un truc genre " Pot des anciens
combattants " et c'est au cours de cette réunion que nous
faisons connaissance avec Bernard Grivel, notre secrétaire
actuel.
Tout le monde a la pêche et on se fixe comme lieu d'entraînement
le parking du stade du Prado. C'est de la folie : slalom, saut, free-style
sont les seuls disciplines que nous pratiquons, mais ça gaze
d'enfer !
Le club compte alors trente-deux adhérents. Jacky Frasnier,
le gentleman farmer président du club vierionnais, nous annonce
que la coupe de France de la FFSS fera un " Acid Drop "
à Vierzon-Ville. Moumoun (Christophe Mounin) vient remplir
le club de... taules et crises de rires. Délirante et humiliante
à la fois, cette compète : of course, on y rencontre
tout le gratin de l'époque, mais tout le monde nous mate comme
des Martiens. Faut dire qu'on a pris du retard : on ne connait ni
les nouvelles figures, ni les règlements appliqués.
Résultat : lorsqu'on demande comment passer le slalom,
on nous répond " Facile ! C'est comme au ski ! "...
Quand on parle de rampe, on nous lance un regard froid en nous faisant
comprendre qu'" ici, c'est pas du cirque I " Pas cool tout
ça.
Heureusement, nous rencontrerons trois mordus de verticale : les Rochelais
Patrick Bernard, Frédéric Chevalier et Jean-Paul Martin.
Ils nous expliquent que la Fédé a trois trains de retard
et qu'ils restent bouchés quand on leur parle de verticale.
Ils nous indiquent quand même le skatepark de la Roche-sur-Yon
et nous invirent à skater leur half d'un mètre quatre-vingt
de large ! On n'en peut plus. On thrashera le bank vierzonnais jusqu'à
deux heutes du mat', et je ramène tout ce petit monde chez
moi, sous les yeux étonnés de ma môman. Toute
la nuit, une seule idée me trotte dans l'esprit : récupérer
la rampe " Rollet " de Joué-les-Tours... Le week-end
passé, je contacte les services techniques de la ville de Bourges
afin qu'ils accordent le prêt d'un camion pour aller chercher
la rampe. Quant à la société " Rollet ",
pas de problème, elle nous accorde le droit de récupérer
la rampe.
Entre-temps, un saut de puce est fait à la Roche-sur-Yon. Une
seconde fois, la coupe de France passe faire un " ollie "
à Vierzon. On y rencontrera Jean-Noël Félisot et
son pote Dominique, deux verticalistes de talent. Avec Jean-Paul,
nous décidons d'organiser à Bourges une mini-compète
de rampe, histoire de tater le terrain. Notre rampe ne fait que deux
mètres quarante de large, mais ça nous suffit. Peu de
skateurs (on avait invité tous les skateurs de la coupe vierzonnaise.
Réponse : " Allez-vous casser les poignets tout seul !
") mais beaucoup de spectateurs. Et puis, un après-midi
où je repeignais la rampe, un adjoint de la mairie passe me
voir en me demandant si un lieu couvert nous intéressait...
1983. WELCOME IN THE CAVERN ! Le lieu couvert est géant,
dans tous les sens du terme, genre usine désaffectée
des années 20 : tout tombe en ruine, mais grâce à
la Première compagnie d'archers, hébergée sous
le même toit, on peut skater la nuit sous les sunlights !
Jeannot et les Rochelais débarquent un week-end sur deux.
Cette année-là, on rencontre un quatrième Rochelais
: Christophe Bétille. Les Rochelais nous balancent qu'ils
ont démarré la construction d'une nouvelle rampe avec
plat et plateformes : à l'époque, c'est du délire
! Accrochez-vous : pour la fabriquer, ils récupèrent
du bois provenant d'une baraque en démolition et chargent
tout sur l'Ami 8 de Jean-Paul et pendant tout l'hiver, ils découpent
ça dans la cave des parents de Patrick. Au Printemps, nous
nous fixons rendez-vous à Poitiers. Mission : faire tous
les spots connus, en trois jours ! Ça commence par le half
pipe en béton de Poitiers, lisse comme une peau de bébé...
dommage que le rayon soit un peu court. À Angoulême,
deux banks en béton se dressent tels des montagnes. Christophe
Bétille mettra plus de deux heures avant de pouvoir sortir
trois roues (ce truc a dû être copié sur le combi-pool
d'Upland : c'est dingue comme c'est haut !). Puis direction le skatepark
de Saintes : un snake genre mini-rampe de 15 mètres de long
finissant dans un bowl qui, malheureusement, n'a pas de verticale.
Jean-Noël découvre ce truc en même temps que nous
et paraît le connaître comme sa poche...
À la Roche-sur-Yon, nous faisons connaissance avec Christian
Bastien qui nous balance des frontside air canon alors que Fred
Chevalier et Patrick assurent comme des pros dans le half. Puis
c'est l'accident : Jean-Noël se vautre dans le bowl. On le
ramène à la surface, direction l'hôpital. Le
toubib diagnostiquera une simple entorse du genou et le plâtre
pour dix jours. En fait d'entorse, Jeannot s'est déchiré
trois ligaments sur cinq. Opération et six mois d'arrêt.
Dur... Notre chemin continue malgré tout vers La Rochelle,
afin de mater le dernier bijou du New Board Club. Les joailliers
ont super bien bossé. Les plateformes et le revêtement
final ne sont pas encore installés, mais on peut quand même
skater : la structure de la rampe est recouverte d'un parquet !
À la suite de cette tournée, nous décidons
de modifier la rampe " RoIlet " en l'élargissant
d'un mètre vingt et en y ajoutant des plateformes ; comme
on est des fainéants, ça nous prendra beaucoup de
temps... Début juillet ont lieu les championnats de France
de Rouen : la rampe vient d'être reconnue comme épreuve
officielle des contests FFSS ! De retour à Bourges, on bosse
tous pendant l'été afin :
1/ de s'acheter du matos et 2/ foutre de l'argent dans la construction
de la rampe. On achètera le matos à Londres où
nous rencontrons (à Chrystal Palace, temple du skate anglais)
Billy Ruff et Neil Blender, du team G&S. De retour à
Bourges, on organise le premier " Cavernéous Contest
". C'est ce jour-là qu'on voit apparaître un sale
mioche, haut comme trois pommes, avec du talc plein les fesses et
des rollers (horreur !) aux pieds. Le skate le branche. On l'invite
à passer à la rampe le lendemain. On lui refile des
coudières en guise de genouillères et une planche
redécoupée à sa taille. Il paraît doué.
Il s'appelle Sylvain Morel. Au " Cavernéous contest
", tous les skateurs français (enfin quasiment tous...)
sont là. L'ambiance est délirante même si le
niveau n'est pas très relevé. Tout le monde rentre
chez soi plein de bleus et de souvenirs. 83 se referme comme le
couvercle d'un cercueil...
1984. GROSSE ANNÉE POUR NOUS. Lors du premier " Cavernéous
contest ", nous avions fait connaissance d'un jeune prof de
gym, Daniel Fernandez, d'accord pour nous aider à organiser
les championnats de France 84. Afin de bien préparer l'événement,
nous organisons un deuxième " Cavernéous contest
". Nous y faisons la connaissance de Keith Stephenson. Avec
des potes, ce mec a construit en Californie la plus grande rampe
n'ayant jamais existée :15,60 m de large! De plus, ce type
est l'un des top amateurs du moment : il taquine régulièrement
Kevin Staab et Steve Steadham lors des compètes U.S. Lors
du contest, nous montrons les plans de notre future rampe à
tous les skateurs présents : canyon, plat, plateforme et
plein de verticale ! Mais la largeur du monstre fait croire à
tous que nous délirons : 9,70 m. Les demandes de subventions
sont déposées un peu partout. La ville nous alloue
15 000 F, le Conseil général 9000 F et La Jeunesse
et Sports 10000 F. La construction de la rampe avance lentement
du fait de la pluie qui tombe sans cesse, les caisses du club s'assèchent
rapidement. Daniel pond un projet afin de solliciter quelques sponsors
locaux qui nous permettront de trouver les lots de la compétition.
Ce week-end des championnats de France sera géant. Pour preuve
: le directeur de la Direction départementale de la Jeunesse
et des Sports, invité le samedi, revient de sa propre initiative
avec toute sa famille le dimanche ! Tout ce beau monde (cent skateurs
environ, ce qui était impensable à l'époque !)
se retrouve à la mairie pour un pot d'adieu sous forme de
discours et d'odeurs de gâteaux mélangées à
celles des rectors. De ces championnats, tout le monde gardera un
superbe souvenir. 1984 se finira à Rouen, lors des championnats
d'Europe. Organisation un peu légère, mais la présence
de Mike Mac Gill nous mettra une drôle d'idée dans
le crane...
1985. LA DRÔLE D'IDÉE, c'est d'organiser un stage international
de skateboard avec la présence du top U.S. de l'époque
: Mike Mac GilI, Tony Hawk et Rodney Mullen. Rodney et Tony déclinent
notre invitation car ils vont en Suède. Mike nous branche
alors vers Kevin Staab et Per Welinder. Ça marche ! Le camp
est un gros succès. Côté organisation, c'était
vraiment le bordel, mais côté skate, le paradis. Kevin
joue à fond la carte de moniteur et nous enchante tous. Cest
aussi cette année-là que se forme léquipe
des " Berrichons Associés ". Jean-Paul
Alavoine, Bruno Hardouin, etc. participent à 100% à
lorganisation du stage. Nous décidons de construire
une seconde rampe qui devrait, après le stage, équiper
la ville de Paris
(cest la rampe de Choisy ! Enfin
cétait
). Mais on y laisse des plumes. Billy Ruff,
Tod Swank, Grant Brittain, Bruno Peeters, " Mouse "
Mosberg, passeront au " Berrichon Skate Camp ",
desorganised by the " Associates Berrichons "
comme dit la brochure. On se casse la figure sur le plan des finances.
Une subvention de la FFSS de 8 000 F devait nous être envoyée.
On attend toujours.
1986. ET SI ON REMETTAIT ÇA ? Pas de problème. Alors
que j'effectuais un tour de garde (merci madame l'armée française
! ), mon oeil vif distingue à l'horizon la silhouette de
deux grands secs qui explosent de rire à ma vue : Kevin et
Tony Hawk ! Je brûle d'envie de skater avec eux. À
peine arrivé à Bourges, Tony trouve la rampe vraiment
canon et Kevin rentre pour la première fois son Mac Twist.
C'est du délire. Tony, super cool, nous demandera à
plusieurs occasions Si il nous doit quelque chose pour l'avoir hébergé
!
1987. OKAY, ON REFAIT LE CAMP, mais il nous faut un plus. On agrandit
la rampe. On modifie tout. Alors que Bruno et moi-méme sommes
à Mûnster pour la World Cup avec Kevin, Christian Hosoï,
Gator, MoFo, Dave Duncan et Pat Angoho débarquent à
Bourges. Kevin nous présente à d'autres pros : Steve
Caballero, Lance Mountain, Mark Gonzalès... À Bourges,
c'est la folie, le stage démarre très fort. Chris
Miller, Tony Hawk, Mark Gonzalès, Kevin Staab, Joe Johnson,
Sammy Myhre, Dan Bourqui, Sylvain, etc. nous assurent des runs d'enfer.
Alors que je discute avec Bruno Peeters, Tony skate la rampe mollement
: petits backside ollie, petits rock and rolls... jusqu'à
ce que Bruno me fasse prendre conscience que Tony fait un run en
position de " normal foot ", alors qu'habituellement il
skate goofie ! Tout le monde progresse énormément.
Le camp terminé, on organise les championnats de France FFSB
de rampe, saut, slaloms parallèle et spécial. Les
querelles FFSS/FFSB font que certains skateurs ne viendront pas.
Dommage, car c'était le meilleur Jam français que
jai jamais vu en rampe. Sylvain gagnera, je finirais troisième.
Jean Terrisse, un skateur lillois, réalisera un trick radical :
layback grind au sommet de la plus haute extension, qui possède
un mètre cinquante de verticale ! Avec le stage, on
a des contacts avec des journaux et magazines de différentes
tendances : bicross, surf, discoïtude... on entend alors parler
d'un show skate bicross sur rampe à Bercy
1988. UN GROUPE
D'ÉDITION NOUS CONTACTE pour nous parler de ce projet. On
répond oui pour la construction de la rampe et les guidons
quant au choix des skateurs. On n'a pas l'habitude de ce genre de
deal et on ne sait pas trop à qui on a à faire...
mais eux non plus, d'ailleurs. Quarante jours avant l'événement,
on sait qu'on est choisi aux dépens de Tim Payne et Tommy
Kay (les deux principaux constructeurs de la rampe Animal Chin de
la vidéo Powell et Peralta) pour la construction de la rampe.
Heureusement, car à Bourges, ça va pas très
fort question tunes; en plus notre rampe est quasiment accolée
à un gymnase et c'est au cours d'une entrevue avec un adjoint
au sport que nous apprenons, Bruno et moi, la naissance d'un projet
qui, pour nous, est synonyme de cauchemar. Le gymnase risque d'être
agrandi et il nous sera impossible de refaire le stage si nous ne
déplaçons pas la rampe à un autre endroit.
Nous montons une conférence visant àexpliquer le problème
aux élus et, par la même occasion, leur demander une
aide financière afin de construire une nouvelle rampe qui
elle, au moins, aura l'avantage d'être démontable...
La rampe de Bercy ayant plu à tout le monde, il ne nous restera
plus qu'à faire mieux... On se réunit tous et décidons
des mesures et accessoires de la rampe. Après trois semaines
de boulot, la rampe sera achevée au jour " J "
moins un ! Géant. Tous les pros présents l'année
passée reviennent (à l'exception de Tony, Chris, Gator
et Christ). Du côté finances, c'est dur : plein de
mecs se font la malle sans payer. Côté organisation,
c'est encore plus dur : on passe les trois quarts de notre temps
à faire les flics. C'est plus marrant du tout. Autant les
bons sont cool, autant les mioches sont énervants. Suite
à " l'appel du banquier ", on monte la rampe au
Troca et au Zénith. On empoche, heureusement, mais c'était
loin d'être une partie de plaisir. Fred et moi passons deux
nuits d'affilée sans dormir (on ne pourra même pas
skater : c'est l'enfer ! ) et Sylvain, Bruno, Vincent et Philippe
passerons la nuit dans une caisse. C'est le pire souvenir que je
garde du skate...
1989. SUITE AU DOSSIER FAIT AVEC MON BOSS, la ville de Bourges nous
a versé une subvention exceptionnelle de 20000 F (comme demandé)
et le Conseil général du Cher 15000F. Tout va bien,
merci. Nous venons juste de remonter notre " Big Ramp ",
pendant que vous regardiez " Bercy Mégafree " à
la télé. Les services techniques nous ont posé
une prise de courant à l'extérieur du gymnase : on
skate tous les soirs ! Et on va modifier l'autre grosse rampe :
tout sera en état de marche fin avril. J'allais oublier :
en 87, on s'est construit une rampe démontable pour faire
des démos. On en a fait deux à Bourges. L'une d'elles
nous a permis de rencontrer un Conseiller général
qui nous a refilé un local, trop petit pour accueillir tous
les membres du club, mais on y skate quand même les mercredi
matin, vendredi soir et dimanche après-midi. Si jamais vous
souhaitez venir à Bourges, pas de problème. Le nouveau
truc, cest que les rampes sont devenues payantes, comme un
skatepark, ceci afin de mieux contrôler l'activité
et l'entretien. Nous sommes à la recherche d'un local pour
mettre tout cela à l'abri. La municipalité est prête
à en financer en partie la construction mais l'autre partie
reste à trouver... À vot' bon ceur, m'sieurs-dames,
et... a tout à l'heure, " aux " rampes !
À suivre !
Contact : Skateboard Club de Bourges, 6, rue Charles-Cochet,
18000 Bourges.
Par Nicolas Malinowski
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